Mohamed Hassan El Ouazzani : Le pionnier du pluralisme et de la presse indépendante
Publié par La gazette du Maroc le 24/04/2006
Mohamed Hassan El Ouazzani : Le pionnier du pluralisme et de la presse indépendante
Par Bahi Mohamed Ahmed
Notre confrère Bahi Mohamed Ahmed poursuit sa série exclusive sur les leaders politiques marocains disparus. Après Allal El Fassi, dont le portrait a été brossé dans notre édition de la semaine dernière, il nous présente, cette semaine, un autre leader charismatique : Mohamed Hassan El Ouazzani, leader du Parti de la Choura et de l’Istiqlal et précurseur de l’idéal démocratique et pluraliste pour lequel il militait dès les années trente. Un homme politique qui sort des sentiers battus.
Mohamed Hassan El Ouazzani se démarque largement des leaders politiques que le Maroc a connus, que ce soit durant les années de lutte nationale ou après la proclamation de l’indépendance du Royaume.
Mahjoubi Aherdane, qui l’a connu de très près durant les années de braise, affirme que « Mohamed Hassan El Ouazzani a beaucoup plus souffert durant les années de l’indépendance que durant celles du protectorat ». Feu Ali Yata, autre leader et fondateur de l’ancien Parti communiste marocain (aujourd’hui PPS) souligne, pour sa part, que « Mohamed Hassan El Ouazzani est incontestablement l’un des pères fondateurs de la lutte nationale pour l’indépendance ».
Pour sa part, feu Abderrahim Bouabid, le leader charismatique de l’USFP, considère que le leader du Parti de la Choura et de l’Istiqlal (PDI) « était une référence, un maître et un exemple pour ses compagnons de lutte. Son intégrité, sa droiture et ses attitudes audacieuses et sa sagesse à toute épreuve faisaient de lui un patrimoine commun de tous les Marocains de toutes les couches sociales, de toutes les sensibilités politiques et culturelles ».
Un demi-siècle au service de la patrie
Mohamed Hassan El Ouazzani est né en 1910 à Fès. A la proclamation du protectorat, il avait à peine deux ans, mais c’est à un âge précoce qu’il s’engagea dans le mouvement national.
Le 9 septembre 1978, il nous quittera au terme d’un parcours nationaliste exemplaire. Une vie vouée à la liberté, aux idées pluralistes et à la presse authentiquement indépendante.
Un demi-siècle de résistance à toutes les manoeuvres colonialistes, au point de faire de Mohamed Hassan El Ouazzani un phénomène de la vie politique marocaine.
Dans sa démarche, la lutte pour l’indépendance était aussi celle de la démocratie, du pluralisme et l’Etat de droit. C’est ce qui fera de lui un précurseur.
Après des études à El Quaraouiyine, il
ira en France pour parfaire sa formation dans les sciences politiques. Il intégrera également l’école de journalisme et se met à étudier les langues orientales. Il préparera son doctorat de sciences politiques en Suisse et en profite pour créer l’une des toutes premières structures politiques, à savoir l’association des étudiants musulmans en France.
A son retour au Maroc, il fonde la Koutla de l’action nationale et rédige le texte des propositions de réforme interne réclamée dès les années trente par les pionniers du mouvement national.
Utiliser la langue de l’occupant pour le combattre avec
En 1933, il lance le journal « Al Maghrib » et sera, quelques années plus tard, le rédacteur en chef et la cheville ouvrière d’un journal pionnier “L’action du Peuple”, l’organe officiel de la Koutla de l’Action nationale. Une publication pour laquelle il a choisi la langue française. Une autre manière d’utiliser la langue de l’occupant pour le combattre avec.
Tous les cercles politiques s’accordent à considérer Mohamed Hassan El Ouazzani comme étant l’authentique pionnier de
la presse écrite au Maroc. C’est ainsi
qu’il lancera coup sur coup plusieurs publications dont, notamment, le quotidien “Array El Am” (l’opinion publique), “Addoustour” (la Constitution) “Assyassa” (la politique) et “Assaiha” (l’appel). Mais ce qui distingua le plus Mohamed Hassan El Ouazzani est la régularité de ses chroniques et textes qu’il publiait dans les différents journaux qu’il a eu l’occasion de publier durant ces années de lutte anti-coloniale puis durant les premières années de l’indépendance.
Neuf années d’exil au Sahara
Après la scission de la Koutla de l’Action Nationale, il fonda la fameuse “Haraka Al Kaoumia” pour contrecarrer ses adversaires du mouvement national présidé par feu Allal El Fassi, le futur président et leader du Parti de l’Istiqlal. Cette mouvance qui prendra par la suite le nom du Parti de la Choura et de l’Istiqlal (le Parti de la Démocratie et de l’Indépendance PDI).
En 1937, il sera arrêté et exilé au Sahara durant neuf années dans les pénitenciers d’Akka, Tata, Tagounit, Guelmima et Itzer.
Libéré en 1946, il reprendra son action politique et choisira de s’installer définitivement au Caire, la capitale égyptienne, où il poursuivra sa lutte pour l’indépendance des pays du Maghreb et pour la réalisation de ses idéaux panarabes.
On retiendra également de son itinéraire qu’il avait assuré le secrétariat permanent du grand leader arabe, Chakib Arsalane, et qu’il était aussi membre du bureau du Maghreb Arabe au Caire qui réunissait l’élite des militants politiques marocains, algériens et tunisiens et que présidait un certain Abdelkrim Khattabi, membre de la délégation marocaine ayant défendu la cause nationale auprès du mouvement des non-alignés à Bandoeng en 1955. L’occasion de côtoyer, entre autres, les présidents égyptien Jamal Abdennasser, indonésien Sukarno, indien Jawaharlal Nehru sans oublier le leader tunisien Habib Bourguiba. Il ira égalelment aux Nations Unies pour défendre la cause marocaine.
Traduit de l’arabe par Omar El Anouari
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